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Notre article dans Le Devoir, le 11 mai 2017 – Santé mentale et néolibéralisme : un équilibre entre adaptation individuelle et responsabilité collective

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Santé mentale et néolibéralisme : un équilibre entre adaptation individuelle et responsabilité collective

11 mai 2017 – Diane Vinet, Geneviève Fecteau et Mathieu Pigeon – respectivement directrice générale de l’ACSM (Association canadienne pour la santé mentale) – Division du Québec et Filiale de Montréal, directrice de la Division du Québec de l’ACSM et conseiller aux communications de l’ACSM

Tous les membres de notre société sont confrontés aux exigences du « modèle néolibéral ». Si certains font l’apologie de ce modèle, nous considérons plutôt, à l’instar des auteurs de l’article Une bonne santé mentale pour satisfaire aux normes de la société ? (Le Devoir, 6 mai 2017), qu’il est sain et même essentiel de s’interroger sur les normes sociales qu’il a engendrées. En effet, qui peut aujourd’hui nier l’existence — et l’omniprésence — des injonctions à la performance, à l’adaptation, à l’autonomie et à la responsabilité individuelle au sein de notre société ?

La critique du modèle néolibéral nous apparaît effectivement incontournable lorsqu’il est question du bien-être individuel et collectif. Nous souhaitons toutefois rappeler que pour avoir accès à ce bien-être, la personne est confrontée à un certain nombre d’exigences auxquelles elle doit répondre minimalement pour assurer un équilibre dans sa vie quotidienne : par exemple, avoir accès à un revenu décent, un logement adéquat, un réseau social, etc. Pour le dire autrement, un minimum d’adaptation sociale est nécessaire pour ne pas vivre constamment sous pression ou dans l’urgence, et c’est ce minimum qui procure les conditions de base pour maintenir et améliorer sa santé mentale.

Si la mise en lumière des effets pervers du néolibéralisme appelle à un engagement collectif pour réduire les inégalités sociales, nous croyons qu’il est aussi primordial de reconnaître la souffrance individuelle éprouvée par nombre de personnes, et de faire en sorte qu’elles puissent trouver l’aide dont elles ont besoin. La réalité des personnes qui souffrent est bien loin des considérations liées au néolibéralisme. Elles doivent savoir qu’elles peuvent compter sur la présence de professionnels de qualité, offrant une pluralité de services (réseaux communautaire et institutionnel) et de solutions.

À ce titre, nous souhaitons nuancer les propos des auteurs, qui associent la prévention en santé mentale à la « normalisation » des comportements individuels dans une perspective d’adaptation. Rappelons qu’une approche de prévention aura toujours pour objectif de réduire l’incidence des facteurs de risque, sur le plan individuel (ex. : mauvaises habitudes de vie) comme sur le plan collectif (ex. : pauvreté, discrimination, sous-scolarisation, pollution, etc.). Et pour que la prévention soit réellement efficace, il faut entretenir l’espoir. Il faut encourager les gens à demander de l’aide dès qu’ils en sentent le besoin.

Des citoyens adaptés

Voilà pourquoi nous trouvons risqué d’avancer l’hypothèse que l’aspiration à une « bonne » santé mentale puisse constituer une mesure de la soumission au modèle néolibéral. Le bien-être ne rime pas nécessairement avec une adaptation aveugle aux normes sociales contemporaines. Inversement, les difficultés d’adaptation ou la marginalité sociale n’indiquent pas forcément la présence d’un problème de santé mentale.

Pour que la santé mentale devienne une priorité et une responsabilité collectives, il faut impliquer toute la communauté et faire la promotion de l’engagement citoyen. Et pour s’engager, le citoyen doit pouvoir compter sur un minimum d’équilibre et de ressources dans sa vie, des ressources qui s’acquièrent difficilement sans adaptation sociale. En ce sens, nous devons encourager les actions de promotion et de prévention en santé mentale, qui sont axées à la fois sur la consolidation des compétences individuelles ainsi que sur les environnements et les ressources collectives qui y sont favorables.

Nous invitons toute la population à s’engager dans cette voie, à parler de santé mentale dans son entourage, à encourager l’appel à l’aide et à appuyer les démarches des nombreuses organisations, comme la nôtre, qui oeuvrent déjà à la promotion et la prévention. Plus nous serons engagés collectivement, mieux se portera la santé mentale de notre société.

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