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La santé mentale : quelles expertises, vers qui se tourner ?

La santé mentale est l’affaire de toutes et tous. Avec la pandémie, nous avons appris à en parler plus ouvertement, à l’entrevoir comme un enjeu commun. Toutefois, il peut être difficile de discerner qui sont les experts en santé mentale, vers qui se tourner en cas de besoin, voire qui croire.

Qui écouter lorsqu’il s’agit de santé mentale ? Qui offre des soins ? Et qui s’occupe d’éduquer la population sur ces enjeux ? Cet article vise à répondre à ces questions et à démystifier ce qu’est l’expertise en santé mentale.

Avec l’abondance d’information et de conseils qui circulent dans les médias et en ligne, il peut être tentant de tomber dans l’autodiagnostic, particulièrement dans un contexte d’accès limité aux soins. Les experts sont des sources fiables vers qui se tourner en cas de questionnement, mais il faut faire preuve de prudence et de discernement.

Le savoir théorique

La recherche scientifique est à la base des soins et services, de l’éducation en santé mentale et, plus largement, des actions de santé publique. Elle assure la mise à jour des données, le développement des connaissances et l’actualisation des pratiques. On parle ici du savoir théorique.

Le savoir théorique est issu de la recherche de plusieurs champs disciplinaires (sciences de la santé, sciences sociales, etc.). Il peut être basé sur des données quantitatives ou qualitatives récoltées selon une méthodologie rigoureuse. Il faut plusieurs études avant d’arriver à un consensus et d’effectuer des changements sociaux. Par exemple, il a fallu plusieurs recherches avant de conclure des méfaits de la cigarette [1].

Le savoir professionnel

Lorsqu’une personne consulte une professionnelle ou un professionnel de la santé (psychiatre, médecin, psychologue, etc.), elle entre en relation avec le savoir professionnel, dit clinique. Les professionnels ne jouent pas tous le même rôle et chacun détient son champ d’expertise.

Les psychiatres et les psychologues détiennent l’expertise permettant d’évaluer une personne qui consulte et de déterminer ce dont elle souffre. Bien que les psychologues puissent émettre un diagnostic verbal, au Québec, le diagnostic officiel doit être posé par un médecin généraliste ou un psychiatre. Cela peut varier selon le trouble. Le médecin généraliste peut diagnostiquer les troubles communs tels que la dépression et l’anxiété généralisée, et le psychiatre, les maladies plus sévères telles que la bipolarité et la schizophrénie. Outre l’évaluation psychologique, les psychologues détiennent quant à eux l’expertise en matière de psychothérapie [2].

Les travailleuses et travailleurs sociaux, les thérapeutes conjugaux et familiaux, les psychoéducatrices et psychoéducateurs, les ergothérapeutes, les sexologues, les criminologues, les conseillères et conseillers d’orientation, les infirmières et infirmiers praticiens spécialisés peuvent aussi détenir l’expertise pour offrir de l’accompagnement.

 Le savoir terrain

Les années 1970 ont vu l’émergence de nombreux organismes communautaires au Québec, dont certains voués à la réinsertion sociale et à la défense des droits des personnes vivant avec un trouble de santé mentale. Ancrés dans leur milieu et à l’affût des besoins en constante évolution des communautés qu’ils servent, ces organismes sont porteurs de valeurs de solidarité, de démocratie, d’équité et d’autonomie. Ils sont détenteurs d’une expertise pratique qui mêle des considérations de justice sociale, de participation citoyenne et de bien-être collectif à une connaissance des défis auxquels font face les individus et groupes vulnérabilisés [3]. De l’accompagnement à la vie associative en passant par les activités à visée thérapeutique, artistiques, sportives ou autres, ils ont contribué à la reconnaissance du savoir expérientiel.

Le savoir expérientiel

Depuis quelques années, les personnes ayant un vécu avec la maladie mentale sont de plus en plus écoutées et leur expérience est reconnue, voire valorisée, notamment à travers ce qu’on appelle le savoir expérientiel. Ce type d’expertise se base sur une vérité apprise par l’expérience personnelle d’un enjeu de santé mentale plutôt qu’une vérité acquise par la recherche scientifique [4]. Il s’agit d’un savoir fondé sur le vécu et élaboré dans le rapport à la maladie et au contact de personnes ayant une expérience similaire. Il a aussi une portée collective, car il émerge de groupes d’entraide, de communautés de pratique en pair-aidance, de forums sur les réseaux sociaux, etc.

Dans la pratique, le savoir expérientiel est incarné, notamment, par les patientes et patients-partenaires, les membres de groupes d’entraide et les praticiennes et praticiens de la pair-aidance, qui offrent un accompagnement complémentaire à celui des professionnels.

Attention ! L’expérience d’autrui ne doit pas servir à s’auto-diagnostiquer. Il est nécessaire de valider ses symptômes avec un professionnel de la santé.

La promotion de la santé mentale

Les instances gouvernementales et les organismes communautaires qui œuvrent en santé publique possèdent eux aussi leur expertise. Il s’agit d’acteurs de la promotion de la santé mentale. Ces professionnels puisent dans les divers savoirs, théorique, professionnel et expérientiel, pour vulgariser l’information et la partager au grand public en vue d’améliorer le bien-être individuel et collectif. Leur responsabilité est d’éduquer la population, de la sensibiliser et de l’outiller en matière de santé mentale.

La promotion de la santé mentale est intimement liée à la littératie en santé mentale. La littératie en santé mentale, c’est la capacité à lire, à comprendre et à mettre les mots sur ce que nous vivons et ressentons. Cela permet de comprendre ce qu’est la santé mentale, de savoir reconnaître les principaux signes et symptômes des problèmes de santé mentale et de s’approprier des outils qui favorisent notre équilibre et celui de notre entourage. On parle aussi de littératie lorsqu’il est question de savoir s’orienter quant aux ressources et services offerts.

Conclusion

En santé mentale, chacun possède ses connaissances et son champ d’expertise. Prendre soin de la santé mentale des individus et des groupes, cela s’organise en réseau, en tenant compte d’expertises qui ont chacune leur spécificité et leur utilité. Des approches cliniques et des pratiques axées sur le rétablissement à la promotion et la prévention, il existe différentes manières de saisir la santé mentale et d’agir sur elle pour favoriser le bien-être individuel et collectif, dans le système de santé et au-delà.

 


Références

[1] Crépeau, C. (2021, février). Le sucre a tué plus de gens que la cigarette ? Faux. Agence Science-Presse. https://www.scientifique-en-chef.gouv.qc.ca/impact-recherche/le-sucre-a-tue-plus-de-gens-que-la-cigarette-faux/

[2]Benny, M., Huot, A., Jacques, S., Landry-Cuerrier, J. et Marinier, L. (2021). Santé mentale et psychopathologie (3e éd.). Chenelière.

[3] Gouvernement du Québec. (2022). Action communautaire. https://bit.ly/43HEXqj

[4] Borkman, T. (1976). Experiential Knowledge. A New Concept for the Analysis of Self-Help Groups. Social Service Review, 50(3), 445-456.

 

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